Fin 2018, la volatilité a fait baisser les cours des actions américaines (indice S&P 500) de près de 20 % par rapport à leur sommet et de 4,4 % sur l’ensemble de l'année. Dans ces conditions, les obligations de grande qualité ont connu un retour en grâce, avec un rebond à la clé au quatrième trimestre. Dan Ivascyn et Alfred Murata, les gérants du portefeuille de la stratégie Income de PIMCO, évoquent le positionnement de la stratégie face à la volatilité et livrent leurs perspectives pour 2019.

Q : Qu'est-ce qui explique le changement d'humeur des investisseurs au quatrième trimestre et à quoi faut-il s'attendre désormais, selon vous ?

Dan Ivascyn : Les fluctuations des marchés au quatrième trimestre ont reflété la réaction des investisseurs au ralentissement de la croissance, notamment en dehors des États-Unis, l'inquiétude inspirée actuellement par la politique des banques centrales et la grande incertitude qui entoure la politique internationale. La volatilité est aussi en bonne partie de nature technique, découlant d'une moindre liquidité des marchés en fin d’année.

Il convient de mettre cette volatilité en perspective. La dernière décennie peut être qualifiée d'environnement d’après-crise dans lequel les responsables politiques ont cherché à éliminer la volatilité. Nous pensons toutefois que l'environnement de marché est en train de changer et qu'il s'annonce très différent à l’avenir, en raison notamment de l'incertitude politique et de l'interventionnisme nettement moins marqué des banques centrales. La volatilité qui a sévi au quatrième trimestre n'avait rien de surprenant à nos yeux, mais il est très difficile de prévoir exactement quand ces accès de panique surviendront.

Du point de vue de l’investissement, il est essentiel de protéger le capital au cours de ces périodes. À cet effet, notre positionnement est globalement défensif et nous essayons de nous servir de la volatilité des marchés pour passer à l’offensive. Nous nous réjouissons de la bonne tenue de la stratégie Income au quatrième trimestre.

Q : Le rendement des bons du Trésor américain a connu des fluctuations assez marquées : celui des titres à 10 ans a commencé l'année 2018 à 2,4 %. Il a ensuite culminé à plus de 3,2 % pour clôturer l'année à 2,7 %. Quelles sont vos perspectives en matière de rendements cette année ?

Ivascyn : Nous ne sommes pas de ceux qui pensent que lorsque certains niveaux techniques sont atteints, les rendements augmentent mécaniquement. Quand on regarde un graphique qui retrace l'évolution du rendement des emprunts d'État de grande qualité sur le long terme, il n'est pas rare d'observer de longues périodes où les marchés obligataires font globalement du surplace. Or, nous pensons être justement dans l’une de ces périodes où les taux continueront à enregistrer des fluctuations peu marquées à plus long terme.

Une des raisons à cela est que nous n'entrevoyons pas de regain d'inflation significatif. De plus, le taux de croissance de l'économie mondiale est assez faible et la dette demeure élevée. Cela est inquiétant, car le prochain ralentissement économique s'accompagnera très probablement de rendements obligataires nettement plus faibles. Au quatrième trimestre, nous avons eu un aperçu de ce qui peut arriver aux taux lors d'une correction des marchés. En l'occurrence, les obligations de grande qualité ont enregistré un vif rebond.

Dans l'immédiat, nous pensons cependant que des bons du Trésor et d'autres marchés obligataires de grande qualité ont connu des fluctuations quelque peu excessives. Nous ne prévoyons pas de hausse significative des taux d’intérêt au cours des 12 prochains mois, mais nous pensons qu’il existe toujours une probabilité significative de poursuite du resserrement par la Réserve fédérale américaine. Dans les mois à venir, nous ne serions pas surpris de voir les rendements des obligations de grande qualité augmenter légèrement, ce qui appelle une certaine prudence.

Q : Quels ont été les principaux facteurs de performance pour la stratégie Income au quatrième trimestre ?

Alfred Murata : La combinaison entre les avis économiques « top-down » et les idées de transactions « bottom-up » qui caractérise la stratégie Income a bien fonctionné en 2018. En ce début d'année, nous pensions que la croissance économique serait relativement forte à court terme, mais nous redoutions un ralentissement à moyen terme. Par conséquent, nous avons atténué la prise de risque de crédit de la stratégie Income et, au quatrième trimestre, nous avons été en mesure de passer à l'offensive en ajoutant à bon prix des positions sur le crédit. Néanmoins, et j'insiste sur ce point, nous avons réussi à préserver le capital en consacrant une partie du portefeuille à des actifs de meilleure qualité, qui ont été les principaux relais de performance au quatrième trimestre.

Dans l’ensemble, le fait d'avoir consacré une partie du portefeuille de la stratégie à des actifs de meilleure qualité comme les bons du Trésor et les titres adossés à des créances hypothécaires d'agences lui permet généralement de bien résister lorsque la conjoncture économique se dégrade. Dans le même temps, le fait de consacrer une autre partie du portefeuille à des actifs plus rémunérateurs, comme les titres adossés à des créances hypothécaires hors agences, permet généralement de générer des revenus et des plus-values lorsque la conjoncture économique est porteuse.

Q : Comment la sensibilité, ou l'exposition, aux taux d'intérêt a-t-elle évolué au cours du trimestre ? Comment l'envisagez-vous dans le cadre de votre stratégie aujourd'hui ?

Murata : Nous voyons deux grandes raisons en faveur d'une sensibilité aux taux au sein d'un portefeuille : stimuler le rendement total potentiel et protéger le portefeuille contre les risques baissiers. En général, nous avons accru la sensibilité lorsque les taux augmentaient et l'avons réduite lorsque les taux baissaient.

Au cours du quatrième trimestre, le positionnement de la stratégie Income en matière de sensibilité aux taux – principalement au travers de son exposition aux bons du Trésor américain – a contribué à préserver le capital des investisseurs. Nous privilégions les taux américains par rapport à la plupart des autres marchés développés compte tenu du niveau relativement élevé des taux nominaux et réels. Nous maintenons également une certaine sensibilité aux taux australiens, car il est peu probable selon nous que la Banque de réserve d’Australie (RBA) relève son taux directeur dans un avenir proche en raison de la mauvaise passe que traverse le marché immobilier.

Nous sommes plus prudents en ce qui concerne les taux d’intérêt au Japon et au Royaume-Uni, où nous avons opté pour une sensibilité négative. Au Japon, les taux sont si bas que le potentiel de rebond des obligations japonaises nous semble désormais modeste, tandis qu'une normalisation des taux d’intérêt nous semble envisageable. Au Royaume-Uni, l'incertitude autour du Brexit alimente la volatilité, mais nous avons récemment ajouté une position négative sur la sensibilité aux taux sur ce marché, car nous pensons que la sortie de l'UE n'est guère susceptible d’entraîner une baisse significative des taux d'intérêt au Royaume-Uni. En revanche, si le scénario optimiste se concrétise, les taux d’intérêt pourraient augmenter sensiblement.

Q : Pendant la correction intervenue au quatrième trimestre, les spreads des obligations d'entreprises investment grade et à haut rendement, qui flirtaient avec leurs plus bas historiques, se sont nettement élargis. S’agit-il d’une opportunité d’achat ?

Ivascyn : Le creusement des spreads a rapproché les obligations d'entreprises de leur juste valeur d'un point de vue historique et nous nous sommes montrés actifs dans certains segments du marché. Nous sommes désormais plus optimistes en matière d'exposition globale aux obligations d’entreprises, du moins à court terme.

Nous apprécions le secteur de la finance dans son ensemble. D'ailleurs, nous avons profité de la volatilité du marché pour prendre de nouvelles positions sur des émetteurs financiers. Les ratios de fonds propres de nombreuses institutions financières tutoient ou atteignent leur plus haut niveau depuis plus de 10 ans. Actuellement, nous avons un faible pour les banques britanniques, car nous pensons que même un scénario extrêmement négatif pour le Brexit n'implique pas de risque de défaut significatif pour beaucoup d'entre elles.

Cela dit, nous nous sommes montrés globalement sélectifs sur les marchés du crédit d'entreprises et conservons une liquidité élevée dans ce volet de la stratégie. Nos préoccupations à plus long terme restent intactes : les volumes d'émission élevés et la dégradation des protections dont bénéficient les investisseurs dans les segments investment grade et à haut rendement et dans celui des créances bancaires appellent une certaine prudence.

Pour résumer, il est vrai que nous avons augmenté l’exposition à certains segments, mais nous sommes toujours prudents en matière de crédit d'entreprises à plus long terme.

Q : Quels autres secteurs trouvez-vous attrayants pour la stratégie Income ?

Ivascyn : Nous apprécions toujours les investissements liés à l'immobilier, qui offrent des rendements intéressants. Mais surtout, dans une conjoncture économique difficile – comme ce fut le cas au quatrième trimestre – nous pensons que ces positions devraient nettement mieux résister que les autres segments du marché du crédit d'entreprises.

Ces derniers temps, il y a eu une certaine confusion sur le marché immobilier américain, où la hausse des prix et l'intensification des activités connexes ont ralenti. Toutefois, les prix des logements aux États-Unis demeurent assez raisonnables à en juger par divers indicateurs de l'accessibilité à la propriété (ratios prix/loyers et prix/revenus et autres indicateurs à plus long terme). Étant donné les faibles ratios prêt/valeur des prêts hypothécaires, la hausse des capitaux des propriétaires, l'augmentation rapide des salaires et le faible taux de chômage, nous pensons que l'immobilier sera un secteur très résistant. Nous ne nous sommes pas contentés de maintenir notre exposition : nous l'avons même augmentée depuis environ un an.

Par ailleurs, nous apprécions les marchés émergents, qui nous permettent de diversifier la stratégie Income. Nous évoquons souvent la nécessité d’avoir des actifs de grande qualité pouvant servir de couverture contre le risque dans le cadre de la stratégie Income, mais il est presque aussi important d’avoir des positions résistantes et sources de diversification dans la partie à plus haut rendement de la stratégie. Dans l'ensemble, la performance des marchés émergents au second semestre 2018, y compris l'appréciation de certaines positions au quatrième trimestre, a montré que des investissements ciblés dans des secteurs au potentiel de rendement total attrayant peuvent en réalité contribuer à atténuer la volatilité d’un portefeuille, y compris en période de fuite vers la qualité.

Q : À quoi doivent s'attendre les investisseurs sur les marchés et au niveau de la stratégie Income dans l'année à venir ?

Murata : Tout d’abord, les marchés devraient rester volatils. Le fait de maintenir un bon équilibre entre des actifs de grande qualité et des actifs au rendement plus élevé, tout en conservant quelques liquidités, dans la stratégie Income, devrait nous permettre de continuer à tirer profit des perturbations sur les marchés.

En outre, l’augmentation des taux d’intérêt l’an dernier et la récente correction des marchés du crédit a engendré une hausse des rendements obligataires dans l’ensemble, ce qui est de bon augure pour les investisseurs.

Ivascyn : En tant que gérants obligataires actifs, nous devons absolument nous distinguer lorsque l'environnement de marché est difficile et faire en sorte que les investisseurs traversent sans encombre les périodes comme celle que nous avons connue au quatrième trimestre 2018. Cela fait un moment que la volatilité n'avait pas été aussi prononcée sur les marchés du crédit d'entreprises et les marchés émergents. Par conséquent, l’environnement actuel dans ces secteurs est bien plus propice à des investissements ciblés et basés sur la valeur relative que ces dernières années. L’équipe Income est très enthousiaste à l'idée de saisir ces opportunités en 2019.

L’auteur

Daniel J. Ivascyn

Group CIO

Alfred T. Murata

Gestionnaire de portefeuilles

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