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os opinions de longue date concernant les risques pesant sur le statu quo sont intégrées par les marchés financiers, comme en témoigne notamment la volatilité accrue. Comme nous l'expliquions dans nos Perspectives séculaires intitulées « Des lendemains qui déchantent », ainsi que dans nos Perspectives cycliques intitulées « Une croissance qui ralentit », nous estimons que le pic de croissance cyclique de l'économie mondiale est derrière nous, que le soutien des banques centrales continue de s'effriter et que des risques politiques se profilent dans plusieurs pays. Ces tendances étayent notre positionnement relativement prudent et notre biais marqué en faveur des actifs liquides, qui nous permettront de réagir à des opportunités spécifiques ou à un élargissement général des spreads et une hausse de la volatilité.
Nous devrions conserver des positions offrant un portage positif, même en sous-pondérant les obligations d'entreprises cash, par le biais d'opportunités de crédit spécifiques, de titres adossés à des créances hypothécaires (MBS) d'agences et hors agences, d'une faible proportion de devises émergentes et de positions tablant sur une pentification de la courbe. Cette approche est en ligne avec notre scénario de base cyclique toujours relativement optimiste et notre désir de nous protéger contre les risques baissiers et de mettre l'accent sur la liquidité et la structure du marché du crédit en cas de rotation au détriment des positions très prisées.
C'est en substance ce qu'a retenu le Comité d'investissement de PIMCO à l'issue du Forum cyclique de décembre, qui a réuni les professionnels de l'investissement de la société, venus des quatre coins du globe, ainsi que plusieurs de nos conseillers seniors, dont Ben Bernanke, président du Comité consultatif mondial de PIMCO, Michael Spence, lauréat du prix Nobel d'économie en 2001, et Gene Sperling, ancien directeur du Conseil économique national et Assistant du président pour la politique économique auprès des présidents Bill Clinton et Barack Obama.
« Nous avons aussi bénéficié des contributions de Richard Thaler, le lauréat du prix Nobel d'économie 2017, sur la manière d'éviter les pièges de la pensée de groupe et des biais comportementaux chez les investisseurs. »
Nous avons par ailleurs profité des contributions d’Alan M. Taylor, professeur d’économie à l’Université de Californie à Davis, sur les leçons tirées des cycles du crédit dans plusieurs pays au cours des 150 dernières années, et de Richard Thaler, lauréat du prix Nobel d’économie en 2017, sur la manière d’éviter les écueils de la pensée unique et les biais d’investissement comportementaux.
M. Thaler est membre du conseil de direction du Centre de recherche décisionnelle de la Booth School of Business de l’Université de Chicago, avec lequel PIMCO a noué un partenariat de recherche en sciences comportementales.
Lors du forum, les débats se sont concentrés sur cinq thèmes macroéconomiques clés qui dicteront probablement l'évolution des perspectives cycliques et de marché pour 2019.
Débat n° 1 : Où en est le cycle ?
Nous soutenons depuis un certain temps déjà que le cycle économique est entré dans sa phase ultime, opinion qui fait désormais consensus. Mais, sachant que de telles phases peuvent s’avérer relativement longues, la question est : où en sommes-nous réellement ?
Pour commencer, nos modèles quantitatifs actualisés indiquent que la probabilité d’une récession de l’économie américaine au cours des 12 prochains mois a augmenté pour atteindre environ 30 % récemment, de sorte qu’elle est désormais plus élevée qu’elle ne l’a jamais été lors de la phase d’expansion que nous connaissons depuis 9 ans maintenant. Pour autant, les indicateurs sont à l’orange plutôt qu’au rouge.
Un constat similaire ressort d’un nouveau modèle de classification des phases présenté lors du forum. Ce modèle, qui passe en revue et combine un grand nombre de données économiques et financières afin de déterminer à quel stade de la phase d’expansion ou de récession nous nous trouvons, indique que nous pourrions encore être à peu près au milieu de la phase d’expansion économique. Cependant, à l’horizon d’un an, le modèle prévoit la fin de cette phase, voire l’amorce d’une récession.
Une analyse plus qualitative corrobore les modèles quantitatifs : nous n’observons pour l’heure aucune surchauffe des marchés de l’emploi et de marchandises, ni aucun comportement excessif en matière de dépenses ou de crédit, qui avaient été autant de signes annonciateurs d’une récession par le passé. Il n’existe donc aucune preuve irréfutable de l’imminence d’une récession, et si la phase d’expansion dure depuis un certain temps, elle ne touche pas encore à sa fin.
Cependant, le contexte actuel montre clairement que les marchés financiers peuvent être en proie à des troubles indépendamment d’une récession. En outre, certains participants ont avancé lors du forum que la prochaine récession pourrait découler d’une baisse des actifs financiers plutôt que d’une surchauffe macroéconomique ou d’un recours excessif à l’emprunt, comme c’est traditionnellement le cas.
Débat N° 2 : La fin de l’exception économique américaine ?
S’il est probable que la phase d’expansion entrera dans sa dixième année l’an prochain, l’écart de croissance entre les États-Unis et le reste du monde devrait selon nous se réduire.
Les États-Unis ont fait figure d'exception à maints égards l’an passé : grâce à d’amples mesures de relance budgétaire, la croissance américaine s’est accélérée alors que le reste du monde a connu un ralentissement, la Réserve fédérale a relevé ses taux en toute confiance tous les trimestres, le marché actions a fait mieux que la plupart des autres places boursières mondiales et le dollar a pris de la hauteur malgré les protestations du président.
À plus long terme, selon nous, la croissance américaine devrait elle aussi subir un ralentissement synchronisé face au durcissement des conditions financières, à la dissipation de l’effet des mesures de relance budgétaire et au récent plongeon des prix du pétrole, qui bénéficie plus à l’Europe, au Japon et à la Chine qu’aux États-Unis, devenus exportateurs nets de pétrole. Notre prévision concernant la croissance du PIB américain en 2019 reste inférieure au consensus à 2,0 %-2,5 %, et le rythme trimestriel de la croissance devrait selon nous ralentir à moins de 2 % au second semestre. Ainsi, l’économie américaine et les autres grandes économies développées convergent vers une croissance tendancielle.
Malgré la réduction de l’écart de croissance avec le reste du monde, nous continuons de penser que les actions américaines vont surperformer, car les entreprises affichent des bénéfices plus élevés et le poids des secteurs cycliques sur le marché actions est moins important outre-Atlantique. En ce qui concerne le dollar, les opinions exprimées au cours du forum se sont avérées plus mitigées. L’optimisme à l’égard du billet vert qui avait prévalu lors des forums précédents cette année s’est nettement estompé, bien que le différentiel de taux favorable fasse obstacle à une forte baisse de la devise à ce stade.
Débat n° 3 : L’inflation finira-t-elle par remonter ?
Le récent plongeon des prix du pétrole et l’atonie persistante de l’inflation sous-jacente aux États-Unis, en Europe et au Japon nous ont incités à réviser à la baisse nos prévisions d’inflation pour 2019. Selon notre scénario de base, l’inflation sous-jacente devrait marquer le pas ou augmenter légèrement dans ces trois régions, et ainsi rester inférieure aux objectifs fixés.
Malgré cette perspective favorable, nous avons passé un bon moment à examiner l'inflation et nous sommes interrogés quant à savoir s’il était possible que nous soyons dans l’erreur. Après tout, l’inflation des salaires aux États-Unis a atteint 3 % pour la première fois lors de cette phase d’expansion, et elle a également augmenté en Europe et au Japon cette année.
Il est tout à fait possible que les salaires commencent à accélérer davantage en réponse à la baisse du chômage, ce qui entraînerait un coude dans la courbe de Phillips, qui illustre la relation entre chômage et salaires. Cependant, nous avons conclu que la hausse de la croissance de la productivité contribuerait probablement à atténuer la pression des coûts unitaires de main-d’œuvre et que, face à l’augmentation de la concurrence et de la transparence sur les marchés de marchandises, due à l’ effet Amazon, l’inflation des prix à la consommation resterait vraisemblablement modérée.
Nous avons également débattu de la théorie budgétaire du niveau des prix (Fiscal Theory of the Price Level, ou FTPL), une théorie non conventionnelle de l'inflation selon laquelle une augmentation des taux d’intérêt nominaux entraîne à terme une hausse de l’inflation. Cette théorie postule que, si les acteurs économiques ne croient pas que le gouvernement réduira ses dépenses ou augmentera les impôts à l’avenir en réponse aux hausses de taux d’intérêt de la banque centrale (ce qui entraînerait une augmentation des coûts d’emprunt du gouvernement) et estiment qu’il se comportera ainsi de manière « irresponsable », une lente spirale inflationniste peut s’amorcer. La raison en est que dans ce scénario, les entreprises auront l’impression d’être plus riches et dépenseront plus si les emprunts d’État versent des intérêts plus élevés sans que cela soit financé par des hausses d’impôts ultérieures. Si la banque centrale relève davantage ses taux en réponse, les coûts d’emprunt du gouvernement en seront encore accrus et la spirale inflationniste s’amplifiera de plus belle.
Toutefois, si de tels scénarios ont pu se produire sur certains marchés émergents par le passé, la plupart des participants au forum ont réfuté l’idée que les acteurs des économies développées puissent s’attendre à ce que leurs gouvernements se comportent de manière « irresponsable » sur le long terme – condition nécessaire pour que les effets précités soient mis en œuvre et, donc, pour que les consommateurs commencent à dépenser plus dans un contexte de hausse des taux d’intérêt.
Débat n° 4 : La Fed marque une pause, et ensuite ?
La Fed, qui devrait très probablement relever ses taux pour la quatrième fois cette année le 19 décembre, ne devrait selon nous procéder qu’à une ou deux hausse(s) supplémentaire(s) en 2019. En effet, il semble de plus en plus probable qu’elle marquera une pause au premier semestre 2019, dans la mesure où le durcissement des conditions financières et la réduction de son bilan contribuent suffisamment selon elle au resserrement de sa politique monétaire.
Toutefois, si tant est que la Fed marque une pause, relèvera-t-elle ensuite à nouveau ses taux ou s’engagera-t-elle sur la voie de la détente après une pause plus ou moins longue ?
Il convient de noter que les projections de taux d’intérêt (« dot plot ») de la Fed intègrent d’ores et déjà une pause l’an prochain, suivie de nouvelles hausses, ce qui s’explique par le fait que les prévisions moyennes des membres du FOMC tablent sur un ralentissement du rythme des hausses, dont le nombre devrait passer selon eux de quatre en 2018 à trois en 2019, puis à deux en 2020.
Nous avons cependant admis lors du forum qu’il serait difficile d’évoquer une pause sans que les marchés voient en cela la fin du cycle de hausse des taux et l’amorce d’une détente. Comme nous l’a rappelé Ben Bernanke, ses déclarations dans le sens d’une pause lors du dernier cycle des taux ont engendré une importante volatilité. S’il est possible que d’autres banques centrales, comme la Banque d’Angleterre, s'en sortent en cas de pause et poursuite du resserrement, cela paraît plus difficile pour la Fed compte tenu de son importance sur l’échiquier mondial.
Dans ce contexte, la plupart d’entre nous ont estimé que, face à la probabilité croissante d’une récession au fil du temps, il était relativement peu probable que la Fed relève à nouveau ses taux après avoir marqué une pause.
Débat n° 5 : Conflit États-Unis-Chine, trêve ou paix ?
Nous avons débattu des perspectives des relations entre les États-Unis et la Chine alors que Donald Trump et Xi Jinping venaient de convenir de marquer une pause dans leur course aux droits de douane et d’entamer des négociations en vue de parvenir à un accord sous 90 jours.La volonté affichée par les deux parties de trouver un compromis avant que la hausse des barrières douanières ne mette à mal l’économie a donné à penser à certains participants que le pire du conflit commercial était passé.
Cependant, pour la plupart d’entre nous, celui-ci avait des causes plus profondes et dépassait largement le seul cadre des échanges, de sorte qu’il demeurerait source d’incertitude et de volatilité même si un accord commercial était conclu. L’image d’un « clash des systèmes » utilisée par Mike Spence pour décrire le conflit a résonné parmi le public et a fait écho au débat que nous avions eu lors du Forum séculaire en mai quant aux risques d’un « piège de Thucydide », c’est-à-dire d’une confrontation entre une puissance établie et une puissance émergente.
Recommandations d'investissement
Comme nous l’avons vu plus haut, nos opinions à court et long terme en matière de risques sont reflétées dans les cours des marchés financiers. Dans ce contexte, nous recherchons des sources de portage élargies et diversifiées sans miser sur le risque lié aux obligations d’entreprises génériques et conservons une approche globalement prudente en ce qui concerne la construction de nos portefeuilles.
« Il nous semble avisé de ne pas nous écarter outre-mesure de notre positionnement actuel en termes de risques macroéconomiques top-down, de conserver des liquidités disponibles et de rechercher des opportunités spécifiques dans un environnement de marché plus difficile. »
Il nous semble avisé de ne pas nous écarter outre mesure de notre positionnement actuel en termes de risques macroéconomiques top-down, de conserver des liquidités disponibles et de rechercher des opportunités spécifiques dans un environnement de marché plus difficile, caractérisé par des fluctuations excessives en regard des fondamentaux. Le fait de conserver une certaine marge de manœuvre dans notre budget de risque (par exemple en détenant davantage de liquidités ou en acceptant une baisse du rendement global de nos portefeuilles) afin de pouvoir répondre à des opportunités spécifiques ou à un élargissement important des spreads et à une hausse de la volatilité présente une valeur d’option importante.
S’il est somme toute réconfortant de savoir que nous sommes encore loin de la prochaine récession, comme tend à le démontrer notre analyse des facteurs macroéconomiques, le contexte actuel montre clairement que les marchés financiers peuvent être en proie à des troubles indépendamment d’une récession. En outre, la prochaine récession pourrait découler d’une baisse des actifs financiers plutôt que d’une surchauffe macroéconomique, comme c’est traditionnellement le cas.
Un tel contexte incite selon nous à privilégier les instruments liquides, sauf si une exposition à des actifs peu liquides s’avère payante.
Légère sous-pondération de la sensibilité aux taux, surpondération des TIPS
Bien que, par suite de la récente hausse de la sensibilité aux taux au niveau mondial, les rendements soient proches de la limite inférieure de notre fourchette cible, nous souhaitons, dans un contexte incertain, conserver un positionnement quasi inchangé en termes de sensibilité, avec seulement une légère sous-pondération à l’échelle mondiale, hormis au Japon.
La sous-pondération du Japon offre selon nous une bonne protection contre une nouvelle hausse (inattendue) de la sensibilité aux taux au niveau mondial, dans la mesure en outre où nous prévoyons que la Banque du Japon (BOJ) continuera de réduire ses achats nets d’actifs et/ou modifiera sa politique de plafonnement de la courbe des rendements afin de permettre une légère hausse des rendements et une pentification de la courbe.
Bien que notre scénario de base table sur le maintien d’une inflation modérée, les points morts des obligations du Trésor américain indexées sur l’inflation (TIPS) ont chuté. Selon nous, en outre, les TIPS affichent des valorisations relativement attrayantes et offrent une protection contre une éventuelle hausse surprise de l’inflation aux États-Unis en cette fin de cycle.
Courbe : positionnement long sur la partie intermédiaire, court sur la partie longue
Les positions misant sur une pentification de la courbe des rendements mondiaux constituent selon nous une source structurelle de revenus et, dans le contexte actuel, nous privilégions la partie intermédiaire de la courbe par rapport à la partie longue au vu des valorisations. La courbe est déjà très plate, dans la mesure où le risque de récession reste selon nous modéré à l’horizon des 12 prochains mois. Tandis que la Réserve fédérale a commencé à réduire son bilan, la Banque centrale européenne s'apprête à mettre fin à son programme d’assouplissement quantitatif (QE), ce qui, nous en restons convaincus, devrait aboutir au rétablissement d’une prime de terme avec le temps. Bien entendu, les positions tablant sur une pentification de la courbe offrent également une protection intégrée contre la possibilité que notre prévision du risque de récession soit erronée et qu’une nette dégradation de la conjoncture économique contraigne la Fed à mettre fin à la normalisation de sa politique monétaire.
Prudence à l’égard des obligations d’entreprises génériques
Nous prévoyons de sous-pondérer le crédit d’entreprise, et notamment le bêta des obligations d’entreprises génériques, tout en continuant à rechercher des opportunités sur le marché obligataire. Bien que les valorisations du crédit se soient rapprochées des moyennes à long terme, les obligations ne sont pas bon marché pour autant, tandis que la volatilité augmente et que le ralentissement de l’économie pourrait mettre au jour des faiblesses sous-jacentes en termes d’endettement. Nous restons inquiets quant à la surabondance des positions de crédit sur le marché et à la structure/l’illiquidité du marché du crédit, qui pourraient entraîner une réaction excessive en cas d’affaiblissement plus généralisé du crédit. Nous souhaitons conserver un niveau de qualité et de liquidité optimal en continuant de miser sur des titres qui, selon notre équipe mondiale d’analystes crédit, recèlent de la valeur et présentent un faible risque de défaut. Nous mettons l’accent sur les risques baissiers et la structure/la liquidité du marché du crédit dans l’éventualité d’une rotation au détriment des positions très prisées.
Opportunités de valeur relative parmi les valeurs financières et les MBS
Comme indiqué précédemment, nous prévoyons de rechercher des opportunités attrayantes et réellement bon marché dans un contexte plus volatil, et souhaitons conserver des liquidités pour exploiter ces opportunités. À cet égard, les valeurs financières continuent d’offrir selon nous des opportunités de valeur relative intéressantes. Dans la mesure où un échec des négociations sur le Brexit nous semble très peu probable, les valeurs financières britanniques, notamment, sont attrayantes à leurs valorisations actuelles. Si ce scénario extrême devait toutefois se réaliser, bien que l’on puisse clairement s’attendre à ce que ces titres sous-performent à court terme, les banques britanniques disposent de solides fonds propres – comme l’ont démontré les tests de résistance très stricts auxquels la Banque d’Angleterre les a soumises récemment.
Les titres hypothécaires non émis par des agences continuent d’offrir une alternative défensive aux obligations investment grade (IG) et présentent un meilleur profil en termes de risque baissier, dans l’éventualité d’une dégradation des conditions macroéconomiques et/ou du marché du crédit. Les titres adossés à des créances hypothécaires (MBS) d’agences nous paraissent également attrayants et constituent une source de revenus relativement stable pour nos portefeuilles.
Sous-pondération du risque lié aux pays périphériques de l’Europe
Nous restons prudents à l’égard de la dette souveraine et privée des pays de la périphérie de l’Europe compte tenu des défis immédiats auxquels l’Italie est confrontée et, d’un point de vue plus général, des risques à plus long terme qui se profilent pour la zone euro lors de la prochaine récession. Cependant, nous continuons de rechercher des obligations présentant un profil risque/rendement attrayant dans la zone euro.
Opportunités sur les marchés des changes et obligataires émergents
Face au ralentissement synchronisé de la croissance des économies dans le monde, notre opinion à l’égard du dollar américain par rapport aux autres devises du G10 est mitigée. Nous prévoyons de surpondérer légèrement les devises émergentes dans le cadre de stratégies assorties d’un niveau de risque approprié et, plus généralement, face aux difficultés liées au contexte actuel, de rechercher des opportunités attrayantes sur les marchés obligataires émergents en devises locales/externes.
Actions : Priorité aux valeurs de croissance défensives de qualité
D’une manière plus générale, en termes d’allocation d’actifs, nous pensions que l’arrivée à maturité du cycle exercerait une pression baissière sur les multiples de valorisation des actions. Aujourd’hui, nous tablons sur une baisse des prévisions de croissance des bénéfices face à la disparition des facteurs de soutien et aux effets à retardement du resserrement des conditions financières.Les marchés actions devraient selon nous rester volatils, ce qui nous incite à adopter un positionnement défensif et à mettre l’accent sur les valeurs de croissance défensives de qualité, en réduisant au minimum notre exposition au bêta cyclique des actions. Nous continuons de faire la part belle aux marchés actions américains, qui affichent des bénéfices plus importants que les autres marchés mondiaux, et privilégions les actions à grande capitalisation de qualité à ce stade du cycle, tout en attendant que des opportunités sélectives se présentent au cours de notre horizon cyclique.
Matières premières : Opinion légèrement positive à l’égard du pétrole
Nous adoptons un positionnement globalement neutre vis-à-vis du risque de bêta des matières premières et sommes relativement optimistes à l’égard du pétrole brut. Par suite d’une hausse inattendue de la production américaine, conjuguée à un ralentissement de la demande mondiale, le marché pétrolier connaît une situation excédentaire.L’annonce récemment faite par l’OPEP d’une réduction de sa production traduit sa volonté de contribuer à maintenir le prix du baril à 60 USD ou légèrement plus, tout en évitant qu’il ne retombe aux plus bas de 2014, et sans pour autant restreindre l’offre de telle sorte que le pétrole perde encore du terrain au profit du gaz de schiste. En ce qui concerne le gaz naturel, les cours sont fonction des conditions météorologiques et les stocks restent faibles, mais le niveau actuel des prix hivernaux a clairement un impact sur la demande tandis que la production est en forte hausse, ce qui, faute d’un important coup de pouce de la météo, ne laisse guère espérer de nouvelle hausse.Nous continuons de considérer l’or comme un actif à sensibilité longue, notre préférence allant à d’autres actifs de ce type, tels que les TIPS américains, compte tenu des valorisations actuelles.
Perspectives économiques régionales
États-Unis
Après une expansion de près de 3 % en 2018, nous tablons toujours sur une croissance du PIB réel moyenne de 2 à 2,5 % en 2019, inférieure à celle prévue par le consensus, ce qui reflète le récent resserrement des conditions financières, l'atténuation de l'impact de la relance budgétaire et le ralentissement de la croissance en Chine et dans le reste du monde. La dynamique de croissance devrait fléchir au fil des mois pour converger vers la croissance tendancielle, qui est légèrement inférieure à 2 %, au cours du second semestre.
La croissance de l’emploi s'annonce plus modérée en 2019 : les créations d'emplois salariés non agricoles devraient tourner autour de 150 000 par mois en moyenne, un niveau qui demeure supérieur à celui permettant de maintenir un taux de chômage stable au fil du temps. Une nette décrue de l'inflation globale est en vue dans les mois à venir en raison d'effets de base et du récent plongeon des cours du pétrole. Pendant ce temps, l'inflation core des prix à la consommation devrait se stabiliser autour de 2 %, car les anticipations d’inflation demeurent ancrées et la courbe de Phillips (inflation) est plutôt plate.
Dans ce contexte, après la hausse attendue des taux des fonds fédéraux en décembre (qui doivent être portés dans une fourchette cible de 2,25 % à 2,5 %), nous tablons sur un ou deux relèvement(s) supplémentaire(s) d'ici fin 2019 et il est probable que la Fed marque une pause, voire mette un terme à son cycle de relèvement au premier semestre.
Zone euro
Nous prévoyons un ralentissement de la croissance du PIB de la zone euro dans une fourchette de 1,0 % à 1,5 % en 2019, inférieure à celle prévue par le consensus, contre près de 2 % en 2018. La révision à la baisse de notre prévision par rapport au mois de septembre reflète le resserrement des conditions financières en Italie, qui va peser sur la croissance, ainsi que le fléchissement de la croissance mondiale.
L'inflation core des prix à la consommation reste coincée aux alentours de 1 % depuis plusieurs années maintenant, mais elle devrait selon nous repartir à la hausse l'année prochaine. En effet, le chômage devrait continuer à reculer et les salaires augmentent plus vite, notamment en Allemagne. Néanmoins, ce taux serait tout de même inférieur aux propres prévisions de la BCE et maintiendrait l'inflation sous son objectif, « légèrement inférieur à 2 % ».
Cependant, la BCE devrait mettre un terme à ses achats nets d’actifs d'ici la fin du mois, comme elle l’a déjà signalé, et nous tablons sur un premier relèvement de ses taux directeurs dans le courant du second semestre 2019. Toutefois, si la Fed marque une pause au premier semestre 2019 (ce qui semble tout à fait plausible), occasionnant ainsi une appréciation significative de l’euro par rapport au dollar, la BCE pourrait bien repousser l'horizon du premier relèvement de ses taux jusqu'en 2020.
Royaume-Uni
Selon nous, la croissance du PIB nominal pour 2019 sera en ligne avec le consensus, mais nous anticipons une répartition plus favorable entre inflation et croissance réelle de la production.
Notre prévision de croissance du PIB réel dans une fourchette de 1,25 à 1,75 % repose sur le fait que nous ne croyons pas à un Brexit chaotique sans accord, car il y aura soit un accord sur une période de transition adopté par le Parlement britannique, soit un gel du Brexit le temps que les négociations aboutissent (ce qui pourrait prendre du temps).
Nos prévisions d'inflation, inférieures au consensus, tablent sur un retour de l'inflation à l'objectif de 2 % dans le courant de l'année prochaine, à mesure que les pressions sur les prix à l'importation se relâchent et grâce à la faible croissance des salaires, qui contient l'inflation dans le secteur des services.
Dans un tel contexte, nous anticipons un à deux relèvement(s) supplémentaire(s) de la part de la Banque d'Angleterre l'année prochaine.
Japon
Nous prévoyons une hausse modérée du PIB nippon en 2019 (entre 0,75 % et 1,25 %), soutenue par un marché du travail proche du plein emploi et une politique budgétaire porteuse. Le relèvement du taux de la taxe à la consommation, actuellement prévu pour octobre 2019, alimentera une certaine volatilité de la consommation trimestrielle car les ménages chercheront à anticiper certaines grosses dépenses. Le gouvernement devrait néanmoins plus que compenser ce relèvement en augmentant ses dépenses et en diminution d'autres impôts, de sorte que la politique budgétaire sera globalement accommodante.
Toutefois, avec les anticipations d'inflation obstinément faibles et l'amélioration de la productivité de la main-d'œuvre qui contient les coûts salariaux unitaires malgré une accélération de la croissance des salaires, l'inflation core hors impact du relèvement du taux de la taxe à la consommation ne devrait augmenter que très peu, dans une fourchette comprise entre 0,5 % et 1 %, bien en deçà de l'ambitieux objectif de 2 %.
La Banque du Japon devrait encore réduire furtivement ses achats d'emprunts d'État japonais (JGB), avec des acquisitions moins nombreuses parmi les échéances supérieures à 10 ans, contribuant ainsi à une nouvelle pentification de la courbe des rendements. Cette mesure vise à atténuer une partie des effets secondaires néfastes des taux d'intérêt bas sur le secteur financier.
Chine
Notre scénario de base table sur un ralentissement de la croissance du PIB en 2019, entre 5,5 % et 6,5 %, reflétant ainsi les lourdes incertitudes au niveau des perspectives causées par les tensions commerciales avec les États-Unis, par les pressions intérieures en vue d'un désendettement et par une politique économique qui tente de répondre à des objectifs partiellement divergents (croissance/emploi vs stabilité financière). Notre scénario de base envisage une relance monétaire plus timorée qui se traduira par une nouvelle baisse du ratio de réserves obligatoires et non par des baisses de taux. Il prévoit également une expansion budgétaire représentant quelque 1,5 % du PIB, axée principalement sur des réductions fiscales pour les entreprises et les ménages.
Notre scénario de base n'envisage qu'une dépréciation modérée du yuan face au dollar américain. Toutefois, en cas d'échec des négociations commerciales entre les États-Unis et la Chine et d'escalade des tensions, il faudrait s'attendre à un assouplissement monétaire et à une nette dépréciation du yuan.